Comment les contributions de solidarité mondiale peuvent aider à combler le déficit de financement pour le climat et de développement

19 novembre 2025 - Étude Climat - Par : Emil HANSEN / Guillaume POTTIER

L’écart entre les besoins et les financements disponibles pour le climat et le développement ne cesse de se creuser, notamment à mesure que l’aide publique au développement (APD) diminue et que les marges budgétaires des pays bénéficiaires se réduisent. Dans ce contexte, les contributions de solidarité mondiale (global solidarity levies)  suscitent un intérêt croissant en tant que source innovante,  additionnelle et prévisible de financements internationaux concessionnels. Lancée lors de la COP28 par la Barbade, la France et le Kenya, le Groupe de travail sur les contributions de solidarité mondiale (Global Solidarity Levies Task Force – GSLTF) est la principale initiative dans ce domaine. 

 

Rapport disponible uniquement en anglais

 

Le présent rapport contribue à ce débat en se concentrant sur les usages potentiels   des recettes issues des contributions de solidarité pour financer l’action climatique. Combinant une analyse quantitative de la finance climat, une étude des priorités figurant dans les stratégies climatiques nationales des pays en développement et une revue de la littérature sur l’allocation de la finance climat, nous constatons que :  

 

  • Les financements climatiques les plus concessionnels, non générateurs de dette,  sont en baisse, en particulier pour l’adaptation et la résilience, tandis que les prêts non concessionnels augmentent. Les pays les moins avancés (PMA) et les petits États insulaires en développement (PEID) sont confrontés à de sérieux déséquilibres financiers, plus de 40 % des PEID étant déjà en situation de surendettement ou proches de celle-ci. Les nouvelles sources de financements hautement concessionnels et ne créant pas de nouvelle dette offrent donc une opportunité aussi intéressante que rare ;  leur l’utilisation doit être mûrement réfléchie.
  • Dans leurs stratégies climatiques nationales, les PMA et les PEID  destinent en priorité les ressources subventionnelles  à l’adaptation, à la résilience et à la réponse aux pertes et préjudices, en mettant particulièrement l’accent sur les secteurs qui maximisent les co-bénéfices pour le climat et le développement et qui ne présentent pas d’options alternatives de financement. Les cadres théoriques et empiriques orientant l’allocation des ressources concessionnelles (et a fortiori des subventions) demeurent peu nombreux et fragmentés. S’ils démontrent une certaine convergence au niveau des principes généraux, ces cadres d’allocation  présentent un haut niveau d’hétérogénéité sur la plupart des paramètres (prise en compte de la vulnérabilité, de l’endettement, effet de levier, etc.). 

 

Sur la base des stratégies nationales et des consultations d’experts, nous proposons quatre principes directeurs pour l’allocation des recettes provenant des contributions de solidarité mondiale :

 

  1. Mettre en cohérence l’usage des recettes générées par des contributions solidaires avec leur assiette fiscale. Sans nécessairement exiger une affectation spécifique et un fléchage budgétaire, le consensus parmi les experts et les exemples passés montrent qu’un tel alignement est un moyen efficace pour renforcer la légitimité, la lisibilité et l’acceptabilité des contributions solidaires. Par exemple, les recettes provenant des prélèvements sur les activités émissives  gagneraient à être utilisées de préférence pour financer des activités liées au climat ou à la résilience, conformément au principe du pollueur-payeur.
  2. Prioriser l’adaptation, la résilience et la réponse aux pertes et préjudices. Ces secteurs font l’objet du large concensus quant à l’existence de besoins importants de financements subventionnels actuellement non couverts.
  3. Se concentrer sur les secteurs qui ne présentent pas de potentiel d’investissement privé viable et qui maximisent les co-bénéfices pour le climat et le développement. Les systèmes d’alerte précoce,  la gestion des risques de catastrophe, la protection des zones côtières figurent parmi les secteurs répondant à ces critères. Enfin, les recettes issues des contributions de solidarité mondiale gagneraient à être utilisées prioritairement sous forme d’assistance technique, pour renforcer les capacités institutionnelles des acteurs locaux.  
  4. Fonder l’allocation des recettes sur des critères de vulnérabilité climatique et économique plutôt qu’uniquement, sur la base du niveau de revenu des pays, en tenant compte des contraintes spécifiques des PMA et PEID. Tout en reconnaissant d’autres cas d’utilisation pertinents, notamment dans le domaine de la santé ou pour la protection de la nature, le rapport se concentre sur le lien entre le climat et le développement, conformément au mandat de la GSLTF. Sous réserve d’une structuration appropriée et d’un cadre de redevabilité solide, les contributions de solidarité mondiale pourraient jouer un rôle catalytique crucial afin de combler le déficit de financement pour l’action climatique et le développement. Elles compléteraient, sans la remplacer, l’APD, en fournissant aux pays vulnérables des ressources prévisibles, additionnelles et non génératrices de dette.   

 

En partenariat avec

 

Comment les contributions de solidarité mondiale peuvent aider à combler le déficit de financement pour le climat et de développement Télécharger
Contacts I4CE
Guillaume POTTIER
Guillaume POTTIER
Directeur de programme – Financement du développement et du climat Email
Pour aller plus loin
  • 28/11/2025
    La finance climat à Belém : une opportunité manquée pour la mise en œuvre – et des coalitions qui avancent malgré tout

    La COP30 s’est conclue par un accord, preuve que le multilatéralisme fonctionne encore, mais son contenu déçoit : aucune décision sur la sortie des énergies fossiles ni contre la déforestation, un bilan mitigé pour l’adaptation. Sur la finance climat, Belém n’a pas réussi à passer de l’ambition à la mise en œuvre. Les négociations ont vite dérivé vers une nouvelle bataille de chiffres. La décision de tripler les financements pour l’adaptation laisse un goût d’inachevé : horizon lointain (2035), absence d’année de référence et formulation peu contraignante. Surtout, la COP30 a manqué l’occasion de s’attaquer aux mesures concrètes identifiées dans la feuille de route de Bakou à Belém pour atteindre 1 300 milliards de financements en 2035. Elle a cependant lancé de nouveaux processus : programme de travail sur la finance climat et table ronde ministérielle sur le NCQG.  

  • 12/11/2025
    Combler le déficit financier : tirer parti des institutions financières publiques nationales et infranationales pour mener des actions locales en faveur du climat et du développement

    Les banques publiques nationales et les institutions financières publiques au niveau local, dont les banques et agences de développement et les fonds climatiques et fonds verts, jouent un rôle de plus en plus important dans le financement de l’action climatique et de la transition juste. Si les gouvernements nationaux établissent des cadres alignés sur les contributions déterminées au niveau national, la mise en œuvre se fait en grande partie au niveau local, qui manque actuellement de financements suffisants. Les institutions financières publiques au niveau local peuvent jouer le rôle d’intermédiaires financiers, car elles comprennent non seulement les besoins au niveau local et entretiennent des liens plus étroits avec les collectivités territoriales et les entreprises locales, mais elles ont également accès à des volumes de capitaux beaucoup plus importants provenant de sources plus diversifiées. 

  • 04/11/2025 Tribune
    Le rôle des institutions financières pour le climat : passer de l’engagement à l’action

    Les institutions financières, notamment les banques et les fonds d’investissement, peuvent jouer un rôle capital dans la lutte contre le changement climatique et le développement durable. Pour cela, elles doivent adopter des pratiques favorisant l’intégration des enjeux climatiques dans les systèmes financiers au niveau local, allant de la mise en place de stratégies climat à l’amélioration de leur performance climatique. L’appui des institutions de financement du développement (IFD) s’avère souvent déterminant. 

Voir toutes les publications
Contact Presse Amélie FRITZ Responsable communication et relations presse Email
Inscrivez-vous à notre liste de diffusion :
Je m'inscris !
Inscrivez-vous à notre newsletter
Une fois par semaine, recevez toute l’information de l’économie pour le climat.
Je m'inscris !
Fermer