Publications Adaptation

6 idées reçues sur l’adaptation au changement climatique

18 octobre 2019 - Billet d'analyse - Par : Dr. Vivian DEPOUES

I4CE et Terra Nova viennent de publier 8 propositions d’actions politiques pour donner une impulsion à l’adaptation au changement climatique.  Il est important d’agir dès maintenant car il serait une erreur de croire que nous pourrons agir au fil de l’eau. Vivian Dépoues d’I4CE et Antoine Guillou de Terra Nova nous présentent les 6 idées reçues les plus communément entendues.

 

Visualisez l’idée 1

 

Nous n’avons aucun retour d’expérience permettant d’affirmer avec certitude que nous saurons nous y adapter au fil de l’eau. Par sa rapidité, ce changement est inédit dans l’histoire de l’humanité. Le changement de cette ampleur le plus rapide – jusqu’à aujourd’hui – dans l’Histoire de la Terre a eu lieu, selon les scientifiques, il y a 56 millions d’années : la température a alors augmenté de 6°C, mais cela a pris entre 10 et 20 000 ans. « Ce pic du «Paléocène-Eocène Thermal Maximum» (PETM), a chamboulé la faune, la flore et le paysage. Il a été la plus rapide et la plus importante perturbation climatique de notre ère, jusqu’à aujourd’hui. Car la Terre vit désormais une situation inédite».

 

Visualisez l’idée 2

 

Parce que l’on ne verra pas tout venir. Si certains impacts du changement climatique sont très visibles d’autres sont difficilement perceptibles. Il est par exemple difficile de se rendre compte au quotidien du déclin de la biodiversité alors que ses conséquences pourraient être dramatiques (WWF 2018). Ces « transformations silencieuses » sont d’autant plus dangereuses qu’elles peuvent être irréversibles et donc définitives. Si l’on anticipe pas, il sera trop tard quand on s’en rendra compte.

 

Visualisez l’idée 3

 

Même en gardant confiance dans la capacité globale de nos systèmes économiques et sociaux à faire face à des changements de l’ordre de +2°C nous ne pouvons ignorer qu’une adaptation subie le serait au détriment de certains acteurs : certains territoires et certaines filières pourraient être de grands perdants s’ils ne préparaient pas leur transformation. Continuer d’investir aujourd’hui dans des activités que le changement climatique rendrait non viables, c’est s’exposer à devoir gérer demain des crises sociales et éventuellement sanitaires majeures. Symétriquement, ne pas anticiper, c’est potentiellement se priver d’opportunités intéressantes que l’on ne se donnera pas les moyens de saisir à temps.

 

Visualisez l’idée 4

 

Se contenter de réagir face à des changements déjà advenus peut par ailleurs conduire à prendre de mauvaises décisions. Dans l’urgence, ou mis devant le fait accompli, on peut ainsi mettre en oeuvre des actions que l’on qualifie de « maladaptation » parce qu’elles contribuent à aggraver le phénomène (par exemple, faire face à des épisodes de canicules en installant des climatiseurs qui rejettent de l’air chaud dans les rues et aggravent l’effet d’îlot de chaleur urbain), à reporter ses conséquences sur d’autres (par exemple en construisant des digues qui aggravent l’érosion dans la commune voisine) ou à augmenter la vulnérabilité à de nouveaux risques (par exemple en misant sur l’irrigation quand certaines ressources en eau pourraient s’épuiser).

 

Visualisez l’idée 5

 

Tous les secteurs ne raisonnent pas sur les mêmes échelles de temps. Quand certaines activités économiques peuvent se permettre d’adapter leurs décisions de façon relativement agile (en changeant par exemple d’une année sur l’autre de fournisseur, en supposant qu’ils ne soient pas tous confrontés au même problème), d’autres ne peuvent se transformer que sur des temps beaucoup plus longs. Certaines évolutions ou reconversions nécessitent des investissements de long terme (par exemple dans de nouvelles infrastructures ou équipements, mais aussi dans la formation et l’acquisition de connaissances), de la R&D, de nouvelles compétences et des temps d’apprentissage incompressibles. Ne pas suffisamment anticiper, c’est alors s’enfermer dans des trajectoires perdantes.

 

Visualisez l’idée 6

 

Ces changements et leurs impacts sont d’ores et déjà très bien documentés par des années de recherche scientifique à l’échelle mondiale (GIEC 2014) mais aussi européenne et nationale, voire infranationale. En France, une mission scientifique confiée à Jean Jouzel et réunissant différentes équipes de recherche a publié cinq rapports sur Le climat de la France au 21ème siècle mettant notamment à disposition des scénarios de changement climatique régionalisés à moyen (2021-2050) et à long terme (2071-2100)10. Ces scénarios sont accessibles via les outils en ligne Climat-HD (grand public) et Drias. Ils permettent à différents acteurs dans différents secteurs (gestion des eaux, assurance, agriculture…) de réaliser leurs propres études de vulnérabilité et d’explorer différentes options d’adaptation. L’Observatoire national des effets du réchauffement climatique (ONERC) tient à jour une base de données d’indicateurs des changements en cours, des études réalisées et assure une veille scientifique du sujet accessible à tous. La publication d’un rapport thématique annuel au Gouvernement et au Parlement a également permis de traiter de sujets capitaux dans ce contexte de changement climatique tels que les événements météorologiques extrêmes (2018), le littoral (2015), l’arbre et la forêt (2014), les outre-mer (2012), la ville (2010), les coûts à attendre (2009) ou encore les risques sanitaires (2007). D’autres travaux thématiques et sectoriels, à l’image de l’étude Explore 2070 sur la ressource en eau ou le programme ACCAF sur l’agriculture, éclairent certaines des conséquences du changement climatique.

Contacts I4CE
Dr. Vivian DEPOUES
Dr. Vivian DEPOUES
Responsable thématique – Adaptation au changement climatique Email
Pour aller plus loin
  • 12/09/2025
    Adaptation : +4°C mais combien d’euros ? 

    Canicules, feux de forêt, le contexte politique et social de cette rentrée ne doit pas faire oublier l’été que nous venons de passer. Les effets du changement climatique s’accélèrent et impactent plus souvent et plus durement les territoires. Aussi, les politiques d’adaptation doivent conserver toute leur place dans la feuille de route du nouvel exécutif. Un débat constructif est possible sur les voies et moyens d’avancer alors qu’aucune force politique n’en questionne les finalités : qui pourrait s’opposer à ce que les élèves puissent apprendre dans des écoles où il ne fait pas 35°C, à ce que nos centres-villes soient moins étouffants, ou à ce que les pompiers disposent des moyens nécessaires pour faire face aux feux et aux inondations ? 

  • 12/09/2025 Billet d'analyse
    La partie immergée mais essentielle des dépenses d’adaptation

    Fonds Vert, Fonds Barnier, Agences de l’eau… notre dernière publication recense au niveau national 1,7 milliard d’euros de dépenses publiques directement dédiées à l’adaptation au changement climatique de la France en 2025. Mais s’arrêter là, c’est ne voir que la partie émergée de l’iceberg de l’adaptation. En réalité bien plus de dépenses contribuent significativement à cet […]

  • 12/09/2025
    Adapter la France à + 4°C: moyens, besoins, financements

    Cette étude s’inscrit dans la continuité des travaux d’[i4ce] engagés depuis plusieurs années sur la qualification et la quantification des besoins et des moyens pour l’adaptation en France. Elle propose une vision d’ensemble de ce que l’on peut dire à date sur ces aspects, basée sur le suivi et l’analyse d’une quinzaine de domaines d’action publique concernés par le changement climatique. Le rapport se structure autour de trois volets : l’effort consenti aujourd’hui, les besoins identifiés pour demain et les modalités de répartition des coûts.

Voir toutes les publications
Contact Presse Amélie FRITZ Responsable communication et relations presse Email
Inscrivez-vous à notre liste de diffusion :
Je m'inscris !
Inscrivez-vous à notre newsletter
Une fois par semaine, recevez toute l’information de l’économie pour le climat.
Je m'inscris !
Fermer