Publications Financement public

Qu’est-ce qu’un « budget vert » ?

24 septembre 2019 - Billet d'analyse - Par : Marion FETET

Alors que le projet de budget 2020 arrive à l’Assemblée nationale, le gouvernement vient de rendre public un rapport sur le « budget vert ». Mais qu’est-ce qu’un budget vert ? Et à quoi peut-il servir ? Marion FETET, qui travaille à I4CE sur le sujet, répond à ces questions.

 

En octobre, le Parlement va voter le budget de l’Etat pour l’année 2020. Le lien avec le climat peut sembler assez lointain au premier abord, mais il s’agit d’un moment essentiel dans la lutte contre le dérèglement climatique. C’est à ce moment qu’on peut parler de l’avenir de la taxe carbone, de la réforme des aides pour la rénovation énergétique ou de celle de l’exonération de taxe sur le kérosène dont bénéficie le secteur aérien.

 

 

Identifier pour mieux informer

Les liens entre budget et climat ne se limitent pas à ces quelques exemples. Il existe de nombreuses autres mesures budgétaires qui ont une influence significative, à la hausse ou à la baisse, sur les émissions de gaz à effet de serre (GES) de la France. Mais ces influences ne sont pas toujours identifiées, ce qui fait que les parlementaires peuvent voter des mesures défavorables au climat sans le savoir. Un « budget vert » n’est pas forcément « vert » en soi, l’objectif d’un « budget vert », c’est justement d’identifier tous les impôts, toutes les dépenses et toutes les niches fiscales qui sont favorables au climat… et tous ceux qui sont défavorables. L’Inspection Générale des Finances (IGF) et le Commissariat Général de l’Environnement et du Développement Durable (CGEDD) viennent de publier leur analyse du budget. Et I4CE publiera le 1er octobre une analyse indépendante de l’intégralité du budget de l’Etat à l’aune du climat.

 

 

250 mesures à suivre ou réformer

Au total, ces travaux montrent qu’il y a plus de 250 mesures favorables ou défavorables au climat dans le budget de la France. Ce recensement les met sur la place publique, sur le radar des décideurs politiques : on peut alors discuter de leur réforme, en concertation avec les secteurs concernés.

 

Ces mesures ne sont pas toujours bien connues. Par exemple, on ne parle quasiment jamais de la taxe sur les cartes grises, alors qu’elle génère plus de 2 milliards de recettes. Elle n’a pas été faite pour aider le climat, mais elle peut s’avérer très utile pour décourager l’achat de véhicules très émetteurs. Peut-être vaudrait-il mieux approfondir le verdissement de cette taxe plutôt qu’augmenter les taxes sur les carburants. Autre exemple : depuis la crise des gilets jaunes, tout le monde sait que le transport aérien bénéficie d’une niche fiscale sur le kérosène. Mais c’est aussi le cas des taxis. En mettant cette niche fiscale sur la table, on peut alors réfléchir à sa réforme : comment continuer à aider les taxis, mais en les aidant à acheter des véhicules moins polluants plutôt qu’en subventionnant le carburant qu’ils consomment.

 

 

Une meilleure transparence à toutes les échelles

Par ailleurs, un budget vert permet à chacun d’entre nous de savoir combien de milliards d’argent public sont dépensés pour aider la France à faire sa transition bas-carbone, mais aussi combien ralentissent cette transition. On peut alors, année après année, suivre l’évolution des finances publiques : dépense-t-on de plus en plus pour investir pour un futur durable ? Et les milliards défavorables au climat diminuent-ils, année après année, comme il faut l’espérer ?

 

Élaborer un budget vert est donc un exercice de transparence indispensable. Et le travail de l’IGF et du CGEDD est à notre connaissance une première mondiale qui doit être saluée. Mais attention : un budget vert serait un échec s’il n’était qu’un rapport de plus ! Ce qui importe, c’est que ce document nourrisse le débat public, informe les parlementaires, les ONG, les entreprises, les citoyens. Idéalement, le gouvernement pourrait dédier l’un de ses Conseils de défense écologique à analyser ce document, et ferait des annonces sur ses prochaines réformes pour verdir le budget.

 

Ce travail de budget vert, la France s’est engagée à le porter lors du One Planet Summit en décembre 2017. L’objectif est maintenant de développer cette analyse dans d’autres pays, qui sont nombreux à avoir signifié leur intérêt pour cet exercice. Et de le décliner au niveau des collectivités locales, qui sont des acteurs clés pour la transition bas-carbone. C’est ce qu’I4CE s’apprête à faire.

Contacts I4CE
Marion FETET
Marion FETET
Chercheuse – Collectivités, Finances locales, Budget vert Email
Pour aller plus loin
  • 14/11/2025
    Climat : les collectivités outillées pour accélérer au prochain mandat

    À la veille du Congrès des maires, l’heure est au bilan pour les collectivités. Le mandat qui se clôture a été largement positif pour la transition des territoires. Grâce au volontarisme de leurs élus et techniciens, de nombreuses collectivités construisent depuis plusieurs années les territoires bas-carbone et résilients de demain. Beaucoup se sont aussi engagées dans une démarche de budgétisation verte visant à mieux faire rentrer l’évaluation de l’impact environnemental des choix politiques au cœur de la discussion budgétaire. En 2023, les collectivités ont ainsi investi près de 8 milliards d’euros pour développer les infrastructures de report modal, rénover leur patrimoine et électrifier leurs véhicules – soit une hausse de 42 % par rapport à 2017.  

  • 14/11/2025 Billet d'analyse
    Climat : où en sont les investissements des collectivités ?

    Porteuses des deux tiers de l’investissement public civil, les collectivités locales jouent un rôle déterminant pour réussir la transition bas-carbone. Le prochain mandat municipal sera décisif pour atteindre les objectifs climat que la France s’est fixée à l’horizon 2030.  À l’heure des débats sur le projet de loi de finances 2026 et à la veille du Congrès des maires, les marges de manœuvre budgétaires des territoires suscitent de nouvelles interrogations. Les analyses d’I4CE montrent que les investissements des collectivités en faveur du climat ont progressé depuis 2017, mais cette dynamique pourrait marquer le pas en cette fin de mandat. Par ailleurs, les montants engagés demeurent encore insuffisants au regard des besoins identifiés pour contribuer aux objectifs nationaux de réduction des gaz à effet de serre. Le prochain mandat doit donc être celui d’un changement d’échelle. Pour réussir, État et collectivités doivent changer de méthode afin d’activer pleinement les leviers existants et renforcer l’action locale en faveur de la transition.  

  • 13/11/2025 Billet d'analyse
    De la bonne utilisation des annexes vertes

    Les collectivités présentent depuis cette année l’impact de leurs dépenses sur l’environnement dans une annexe à leur compte administratif. Les résultats consolidés de ces « annexes vertes » ne sont pas encore publics, mais devront en tout état de cause être manipulés avec précaution. Que pourra-t-on en dire ? Comment les données issues de ces annexes pourront-elles être articulées avec d’autres évaluations utilisées dans le débat public ? En bref, comment les utiliser à bon escient ? Ce billet ouvre la discussion. 

Voir toutes les publications
Contact Presse Amélie FRITZ Responsable communication et relations presse Email
Inscrivez-vous à notre liste de diffusion :
Je m'inscris !
Inscrivez-vous à notre newsletter
Une fois par semaine, recevez toute l’information de l’économie pour le climat.
Je m'inscris !
Fermer