Engager les banques dans la transition : le superviseur doit mieux utiliser le cadre de gestion du risque

16 février 2024 - Édito de la semaine - Par : Romain HUBERT

L’Union européenne continue ses efforts pour que le système bancaire intègre l’enjeu climat. Les banques devront désormais se munir d’un « plan de transition », dont l’Autorité Bancaire Européenne (EBA) précise les contours, par un document mis en consultation jusqu’en avril. On pourrait espérer que les autorités bancaires saisissent cette opportunité pour stimuler les banques à mieux financer la transition, leurs engagements volontaires n’étant pas suffisants. Mais l’EBA n’en fait pas un objectif clair.

 

Pour l’EBA, le but explicite de ces plans, sur le volet climat, c’est de s’assurer que les banques sont résistantes face aux risques liés à la transition et aux impacts climatiques. Peut-on en attendre un bénéfice en termes de mobilisation des banques pour l’action climat ?

 

À priori non, pas en l’état. La proposition se borne à demander aux banques de bien gérer leurs expositions aux risques financiers liés aux impacts climatiques et aux objectifs de transition de l’UE. Typiquement, une banque devra chercher à savoir si les sociétés pétrolières risquent de perdre leur capacité à rembourser leur prêt à cause de la transition. Et la réponse peut être négative, si la banque pense qu’une ou plusieurs sociétés auront les reins solides suffisamment longtemps pour rembourser son prêt, ou si la banque considère que les scénarios de transition les plus impactants sont peu crédibles…

 

Même si l’on garde la perspective prudentielle, qui incombe aux autorités bancaires, il y aurait tout intérêt à favoriser la transition au titre de la gestion des risques. Le plus grand risque encouru par le système financier en Europe, c’est avant tout celui d’un manque de transition, entrainant des impacts climatiques répétés et incontrôlables, encore sous-estimés. Les autorités prudentielles doivent donc se saisir de cet objectif, tout l’enjeu est de définir comment. Il faudra notamment rester cohérent avec le plan d’action des gouvernements, tout en suivant la capacité des banques à prendre du risque pour financer la transition. Les plans de transition doivent y aider !

 

Dans la newsletter de cette semaine, vous découvrirez notre rapport qui développe les liens entre la gestion des risques et la mobilisation du secteur bancaire pour la transition. Vous trouverez aussi nos recommandations pour muscler la proposition de l’EBA, et repenser plus largement l’articulation entre la réglementation prudentielle et l’action climat des gouvernements.

 

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