Transition de l’élevage : gérer les investissements passés et repenser ceux à venir

Si le nombre d’animaux d’élevage diminue depuis plusieurs décennies en France, la consommation de viande ne fait qu’augmenter. C’est ce que documente cette nouvelle étude d’I4CE. Au rythme actuel, aucune des cibles de consommation durable de viande évoquées dans les scénarios de neutralité carbone n’a de chances d’être atteinte d’ici 2050. D’où la nécessité d’explorer de nouvelles pistes de politiques publiques et d’implications d’acteurs privés pour mettre la consommation de viande sur un rythme compatible avec les enjeux de durabilité et l’évolution des volumes de production nationaux.

 

Accompagner la baisse du cheptel 

Tous les scénarios de transition misent sur la baisse du cheptel des animaux d’élevage pour atteindre les objectifs climatiques. Or en France la plupart des cheptels diminuent déjà. L’enjeu n’est donc pas seulement de poursuivre cette dynamique, mais aussi de l’accompagner pour assurer une transition juste et acceptable aux éleveurs et aux acteurs des filières d’élevage. C’est particulièrement vrai pour la filière laitière.

 

Pour accompagner cette transition, il est nécessaire d’en comprendre les impacts économiques et d’évaluer les différents types de coûts qui y sont associés. Les besoins en investissements pour développer de nouvelles filières, même s’ils nécessiteraient d’être mieux chiffrés, font d’ores et déjà l’objet de discussions dans le débat public et même de financements publics comme les 135 millions d’euros de « prime à la conversion d’agroéquipements » ou encore le volet « protéines végétales » du plan de relance.

 

Or, quand un secteur économique voit son activité baisser, se pose également la question du devenir de ses outils de production actuellement en place et qui vont perdre de la valeur comparativement à un scénario de maintien de l’activité. On parle ici des « actifs à risque ». C’est une question particulièrement prégnante en agriculture puisque les exploitants investissent tout au long de leur vie dans leur exploitation avec la perspective d’une bonne valorisation de celle-ci au moment de sa session, afin de s’assurer une retraite décente.

 

Gérer les actifs à risque

C’est pourquoi I4CE a analysé, dans cette étude, les « actifs à risque » dans l’élevage. Il en ressort que les actifs à risque peuvent être de 3 types. Il peut s’agir d’actifs :

 

  1. surdimensionnés si le niveau d’équipement est largement supérieur à l’utilisation qui en est faite ;
  2. reconvertibles si, modulo des coûts pour les adapter, ils peuvent servir à un nouvel usage ;
  3. échoués, s’ils ne sont plus utilisables et ont perdu toute valeur.

 

 

Notre analyse montre que, parmi l’ensemble des actifs immobilisés sur les exploitations d’élevage, ce sont les bâtiments qui représentent le plus grand risque. Si ces actifs à risque constituent un véritable enjeu à l’échelle individuelle, à l’échelle nationale ils représentent quelques centaines de millions d’euros par an à gérer sur une décennie.

 

Ne pas augmenter le stock d’actifs à risque

Chaque année, plus d’un milliard d’euros de subventions d’investissement sont accordées aux exploitations d’élevage. Pour ne pas contribuer à augmenter le stock d’actifs à risque il est nécessaire de :

 

  1. recalibrer ces aides pour éviter le surinvestissement ;
  2. les réorienter pour s’assurer qu’elles favorisent des outils de production compatibles avec les objectifs de durabilité.

 

 

Pourquoi l’élevage doit faire sa « transition » ? À quoi ressemble-t-elle ? Comment accompagner au mieux cette transition ? Quels sont les autres défis de l’élevage ? En deux minutes, Thomas Bonvillain d’I4CE répond à ces questions et parle de la transition de l’élevage en France.  

 

 

 

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Contacts I4CE
Thomas BONVILLAIN
Thomas BONVILLAIN
Chargé de recherche – Agriculture et alimentation et Certification carbone Email
Lucile ROGISSART
Lucile ROGISSART
Cheffe de projet – Agriculture et alimentation et Financement public Email
Claudine FOUCHEROT
Claudine FOUCHEROT
Directrice du programme Agriculture et forêt Email
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